Les étendues



Etendue dans une chambre blanche et jaune, remplie de la lumière brûlante du soleil qui vient frapper ses occupants souffrants.

Une vieille dame aux bras et jambes d'un bleu douteux dans lequel ses yeux ne peuvent se fondre, que ses yeux fuient.
Honte.
Femme vieillie avant l'âge, au coeur malade opéré trois fois sans succès, petite enveloppe de 50 euros à chaque hospitalisation : le prix de sa survie, à elle, la patiente, humaine, le prix de leur survie, à eux, les médecins, matérielle.
Une autre, sans âge, sans voix, sans espoir, les bras criblés de petits trous dans lesquels elle aimerait se cacher pour ne pas voir, pour ne pas entendre.
Honte, encore.
Trois corps affaiblis, condamnés à supporter et nourrir un système pourri.

Trois corps + un quatrième, diminué et chancelant, mais luttant contre les démons qui ont décidé de prendre possession de son corps, d'en faire leur joujou humain, de le sculpter à leur manière, comme un vulgaire bout de bois : deux trous pour les yeux, deux demi-cercles au-dessous, un coeur battant trop vite, une pression sanguine à peine perceptible.

Trois jours dans un hôpital en Roumanie et une sortie trébuchante.
Sauve et à peu près saine.
Sauve mais un peu salie.
Salie par sa propre salissure, celle d'avoir vu, d'avoir entendu, de n'avoir rien donné, de n'avoir rien dit.

Trois jours où les sourires derrière les teints gris valent toutes les pilules et autres substances médicamenteuses censées vous remettre sur pieds. Les intentions des êtres vacillants, les mains tremblantes et tendues vers celle qui tremble et tangue, le partage d'un même temps condamné et condamnant.

La santé est un droit, dit-on, ici son coût n'a pas de prix.

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