Il n'y a donc pas de solitude de... Mircea Ivănescu

 Mardi, c’est poésie, c’est Roumanie.

Et aujourd'hui, j’ouvre la porte à Mircea Ivănescu dont la poésie a réussi, pour reprendre les propos de Gabriel Liiceanu, « à pousser les mots dans un territoire qui semblait leur rester inaccessible : le territoire de « l’instant » ».

Si tous les instants pouvaient être des poèmes, je choisirais ceux de Mircea Ivănescu.

Et le premier serait celui-ci :

***

Il n’y a donc pas de solitude,

nous sommes toujours plus nombreux – en nous-même, 

où que nous allions – et qu’importe combien de fois nous implorions    

les autres d’avoir pitié de la solitude 

de celui ou de celle qui se cachent, aux aguets,

en nous.  

À l’évidence, c’est surtout quand nous prions

ceux qui nous entourent et déroulons devant eux

ce que nous nommons solitude, 

un parchemin couvert d’une écriture arrondie – c’est alors surtout là

que nous ne sommes pas seuls. 

(C’est plutôt  

quand nous sommes seulement nous, et qu’en nous, de l’intérieur,  

l’un tourne le dos, par tromperie, ou envie,  

à tous les autres – c’est alors plutôt là

que nous serions plus proches de la solitude – quand

les autres, en nous – et hors de nous – sourient aux aguets

du mécontent – ou l’ignorent, 

tout simplement. Alors c’est encore pire - 

mais ce n’est toujours pas ça la solitude, toujours pas.) 

« Puis viennent les grandes pluies », quand nous allons

nous cacher dans le jardin du crépuscule – et laissons 

nos visages se refléter dans les feuilles humides,

nous bercer – comme un miroir pour rêver. 

 (in Versuri alese, editions Paralela 45, 2010)



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